Une vague d’inquiétude, de chagrin et de colère secoue le milieu culturel de la région Pays-de-la-Loire. Le 17 octobre dernier, la présidente du conseil régional, Christelle Morançais (ex-UMP puis LR, qui a rejoint le parti Horizons d’Édouard Philippe en 2024), a en effet annoncé vouloir faire 100 millions d’euros d’économies pour les finances de sa Région. Pour ce faire, elle prévoit des coupes drastiques dans certains budgets bien précis : – 93 % pour l’égalité femmes-hommes, – 75 % pour le sport et – 73 % pour la culture…
Du jour au lendemain, de nombreuses associations culturelles ont donc appris que leurs subventions s’arrêteraient net dès 2025, ou baisseraient de moitié avant d’être totalement supprimées en 2026. Face à ces coupes radicales, plusieurs festivals et lieux de culture, comme Les Escales à Saint-Nazaire et la maison de la Poésie de Nantes, pourraient mettre la clé sous la porte, tout comme de nombreuses initiatives culturelles et sociales en faveur des personnes âgées, des femmes ou des jeunes en difficulté.
« C’est un coup porté à la société civile toute entière »
Dans une tribune publiée ce 24 novembre dans Libération, plus de 1 000 artistes et professionnels du monde de la culture liés à la région se sont dit « choqués » et « terrifiés ». « C’est un coup porté à la société civile toute entière », s’indignent-ils, invoquant aussi bien le sort des festivals, théâtres, musées, opéras, centres d’art et productions audiovisuelles, que celui des artistes et des associations.
Parmi les signataires du texte figurent les plasticiens Pierrick Sorin, Théo Mercier, Anne et Patrick Poirier, l’écrivain Daniel Pennac, le réalisateur Christophe Honoré, les acteurs Anna Mouglalis, India Hair, Philippe Torreton et Mathieu Amalric, le chanteur-compositeur Philippe Katerine, le danseur étoile Hugo Marchand, ou encore Sophie Lévy, directrice du musée d’Arts de Nantes, et Jérôme Clément, ancien président d’Arte, qui pilote le festival Premiers Plans d’Angers. La pétition associée à cette tribune a déjà recueilli plus de 48 000 signatures.
Ce lundi 25 novembre, 3 000 manifestants se sont également rassemblés devant le conseil régional à Nantes, « inquiets » et « choqués », pour protester contre « la violence » de ces annonces. Le 5 décembre, une autre manifestation pour le service public est annoncée, les manifestants espérant obtenir un revirement avant le vote du budget, prévu le 19 décembre.
La présidente de la Région reste ferme
Vendredi 22 novembre, Christelle Morançais avait publié un post tranchant sur le réseau social X. Sans exprimer de compréhension face aux inquiétudes, elle y dénonçait une mobilisation « violente » « de LFI, de syndicats et d’associations de gauche », « nourrie de fake news et d’attaques personnelles », qui compromettrait la « sécurité » des élus, la forçant à annuler sa rencontre du 25 novembre avec les maires de Loire-Atlantique.
Ce lundi 25 novembre, la présidente de Région s’est fendue d’un nouveau post. « Je respecte la mobilisation des acteurs culturels […]. Mais je ne laisserai pas dire que la dette et les déficits français ne sont pas un problème […]. Notre pays accumule une dette de 3 300 milliards et un déficit de 180 milliards d’euros en 2024. Personne ne fait pire que la France ». Ces « économies » permettront « d’être plus efficaces là où nous sommes le plus légitimes et le plus utiles : l’emploi, la jeunesse, les transitions », précise-t-elle. De leur côté, les acteurs culturels rappellent que leur secteur n’est pas distinct de ces préoccupations.
En 2021, Christelle Morançais félicitait pourtant chaleureusement Jean Blaise, directeur du « Voyage à Nantes » (événement culturel estival annuel qui vient de se doubler d’une version hivernale), pour son action en faveur de la culture et des artistes, et lui décernait en 2023 un trophée d’excellence récompensant son rôle dans l’économie régionale. Un enthousiasme qui ne semble plus au goût du jour…