Contrairement aux déclarations de l’Onu, le réchauffement climatique n’a joué qu’un rôle minime dans la famine qui frappe le sud de Madagascar, estime une étude publiée jeudi 2 décembre, qui met en cause la pauvreté et la variabilité naturelle du climat.
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La partie sud de l’île de l’océan indien est frappée par une sécheresse inédite en plusieurs décennies, qui a précipité plus d’un million de personnes dans une malnutrition aigüe. En juin, le Programme alimentaire mondial (PAM) avait qualifié cette crise de première famine due au réchauffement climatique provoqué par les activités humaines. Une dimension sur laquelle insistent les autorités malgaches. «Mes compatriotes endurent le tribut d’une crise climatique à laquelle ils n’ont pas participé», insistait ainsi en novembre lors de la COP26 à Glasgow le président Andry Rajoelina.
Mais ce n’est pas ce que dit la science, selon l’étude du World Weather Attribution, réseau de scientifiques pionniers en matière d’attribution des événements extrêmes au changement climatique. Lors des deux dernières moussons (2019-2020 et 2020-2021), la quantité de pluie a été inférieure de 60% à la normale dans le Grand Sud de Madagascar. Un tel déficit de pluie pendant 24 mois consécutifs (juillet 2019 à juin 2021) a chaque année une chance sur 135 de se produire, selon les estimations du WWA. Mais en se basant sur les observations et les modèles climatiques, la probabilité qu’un tel événement se produise «n’a pas augmenté de manière significative» en raison du réchauffement, assurent les chercheurs.
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Ces résultats sont compatibles avec l’évaluation du groupe d’experts climat de l’ONU (Giec) publié en août. Ce rapport indique qu’à Madagascar, l’augmentation prévue des sécheresses sous l’influence du réchauffement ne devrait intervenir qu’à partir de +2°C par rapport à l’ère préindustrielle. Or pour l’instant, le monde a gagné environ 1,1°C. «Nos résultats ne sont pas surprenants (…) J’ai été plus surprise par le fait que l’Onu l’ait étiquetée famine causée par le changement climatique», indique à l’AFP Friederike Otto, de l’université d’Oxford.
Il est important de ne pas automatiquement supposer que tout malheur qui se produit est lié au changement climatique. »
Friederike Otto, de l’université d’Oxford
Le réchauffement de la planète est sans conteste responsable d’une augmentation des événements météorologiques extrêmes à travers le monde, appelés à encore se multiplier. Et les vagues de chaleur spectaculaires sont de plus en plus souvent attribuables au changement climatique. Mais pour tous les événements extrêmes, «le changement climatique est un facteur parmi d’autres, parfois important, parfois petit, ou pas du tout», insiste Friederike Otto. Dans ce cas précis, «s’il y a une part de changement climatique, elle est minime», assure à l’AFP un autre auteur de l’étude, Robert Vautard, de l’Institut Pierre-Simon Laplace. Trop minime pour être détectable.
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L’étude montre donc du doigt comme responsables de cette famine une sécheresse liée au hasard des variations climatiques naturelles, et la vulnérabilité d’une des populations les plus pauvres du monde. Dans une région où la pluie est vitale pour l’agriculture de subsistance et le pastoralisme, «il est difficile pour les communautés locales de faire face à toute sécheresse prolongée», note l’étude. «Il est important de ne pas automatiquement supposer que tout malheur qui se produit est lié au changement climatique», insiste Friederike Otto, soulignant que le réchauffement n’est «pas le seul moteur des inégalités» dans le monde.
Mais ce n’est pas parce que cet événement là n’est pas attribuable au réchauffement qu’il n’est pas réel. «Ils sont quand même touchés par une sécheresse majeure deux années de suite, avec des gens obligés de quitter leur terre. Une situation dramatique», insiste Robert Vautard. «Et comme on a une relative confiance dans le fait que les sécheresses vont augmenter à Madagascar au moins à partir de +2°C, ça pousse quand même à s’inquiéter et à essayer de limiter le changement climatique», poursuit-il. Dans ce contexte, «s’attaquer à la vulnérabilité dans la région et améliorer les conditions de vie est critique», plaide de son côté Maarten van Aalst, directeur du Centre Climatique de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge.
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