Figure majeure du mouvement Dada à Berlin dans les années 1920, Hannah Höch (1889–1978) est pourtant moins connue que ses pairs masculins Raoul Hausmann, George Grosz ou Kurt Schwitters… Née en 1889 dans un milieu provincial, elle est contrainte d’abandonner le lycée pour s’occuper de sa petite sœur. Elle parvient finalement quelques années plus tard à s’inscrire à l’école d’Arts appliqués de Berlin où elle se familiarise avec le dessin sur verre et la calligraphie.
Pendant la Première Guerre mondiale, Hannah Höch travaille brièvement pour la Croix-Rouge dans sa ville natale de Gotha. De retour à Berlin en 1916, elle subsiste en dessinant des motifs de crochet et de tricot pour des magazines féminins. L’artiste entame au même moment une liaison avec Raoul Hausmann et commence à expérimenter, en véritable pionnière, des techniques de collage et de photomontage.
Malgré les réticences misogynes de George Grosz et de John Heartfield, qui ne voulaient pas accueillir de femmes au sein de Dada, Hannah Höch finit par s’imposer et participe aux grands événements du mouvement. Lorsque ce dernier s’essouffle, elle se rapproche de De Stijl. En 1926, l’artiste s’installe aux Pays-Bas avec l’écrivaine hollandaise Til Brugman, dont elle partage la vie pendant près de dix ans.
Le régime nazi considère l’œuvre d’Hannah Höch comme « dégénérée ». De retour en Allemagne, elle passe les années de guerre dans la banlieue de Berlin, dans une grande solitude. Höch ne reprendra son activité artistique qu’en 1947. Dans les années 1970, de grands musées européens, tels que le musée d’Art moderne de la Ville de Paris et la galerie nationale d’Art de Berlin, l’honorent d’une grande rétrospective.
Son œuvre
Les premiers photomontages d’Hannah Höch démontrent le goût de l’artiste pour la satire sociale et politique – en témoignent Schnitt mit dem Küchenmesser Dada durch die letzte Weimarer Bierbauchkulturepoche Deutschlands (1919) et Dada–Rundschau (1919), qu’elle présente lors de la première foire internationale Dada. L’artiste étrille les bonnes mœurs bourgeoises, caricature les représentants de la république de Weimar… Son œuvre est aussi peuplée d’êtres hybrides, qui questionnent les identités et les normes de genre. Celle qui a longtemps dessiné des patrons de crochet dans la presse utilise dans ses photomontages des boutons, rubans et autres étoffes qu’elle détourne pour mieux interroger le rôle social des femmes. Toute l’œuvre d’Hannah Höch, qui résonne toujours avec nos sociétés contemporaines, nous invite à voir le monde sous un jour nouveau, follement subversif, drôle et débridé !
Où la voir ?
Dans de nombreux musées allemands, mais aussi au Centre Pompidou à Paris ou encore au MoMA à New York. En Suisse, le Zentrum Paul Klee de Berne lui a récemment consacré une monographie (« Hannah Höch. Mondes assemblés »), qui sera reprise au musée du Belvédère de Vienne cet été. En attendant, il est aussi possible de se procurer le catalogue (en anglais ou en allemand).
Hannah Höch – Assembled Worlds
Du 21 juin 2024 au 6 octobre 2024
Le Belvédère • 27 Prinz Eugen-Straße • 1040 Wien
www.belvedere.at
Hannah Hoch. Assembled Worlds
Catalogue de l’exposition
Éditions du Zentrum Paul Klee et Belvédère de Vienne · 200 p. · 38 €