Le monde agricole a besoin de « plus de temps » pour se décarboner que le reste de l’économie, a concédé vendredi le ministre de la Transition écologique Christophe Béchu, après une rencontre au Salon de l’agriculture avec de jeunes exploitants très critiques envers les normes environnementales.
« Ce n’est pas un hasard si dans la planification écologique, on demande, on anticipe, une décarbonation beaucoup plus forte de l’industrie que de l’agriculture », a déclaré Christophe Béchu à l’AFP, à l’issue d’un dialogue animé au stand des Jeunes Agriculteurs, syndicat allié de la FNSEA, où le ministre de l’Écologie avait tenté de rassurer ces professionnels.
« C’est parce que pour faire pivoter 390 000 toutes petites structures, il faut plus de temps que pour faire bouger les 50 industries les plus émettrices de France », a-t-il ajouté.
« J’assume que quand vous travaillez sur le vivant, avec des capacités d’investissement qui sont limitées et avec peu de moyens humains, il faut plus de temps que si vous discutez avec des Alstom et des géants de l’acier ».
L’agriculture représentait 18 % des émissions de gaz à effet de serre (GES) de la France en 2021, au 2e rang des secteurs les plus émetteurs après les transports.
« Ce qui compte à la fin, c’est la cohérence du dispositif, c’est qu’on soit à la fois dans le bon rythme sur la baisse des émissions et qu’on soit dans une transition enclenchée, sur laquelle il n’y a pas de recul », a défendu le ministre.
« Mais le faire sans [les agriculteurs], si c’est pour continuer à voir une baisse de la production agricole dans notre pays, c’est un non-sens », a-t-il conclu.
Le ministre venait de passer une vingtaine de minutes à écouter les doléances d’exploitants. Ceux-ci lui ont décrit les conséquences de certaines normes jugées excessives ou incohérentes, notamment sur le curage des cours d’eau, les haies ou le débroussaillage.
« Ce n’est pas l’écologie contre l’agriculture », a répondu le ministre aux agriculteurs, concédant que certaines normes sont allées « au-delà du bon sens » et ne sont plus adaptées l’évolution climatique.
« Le dérèglement climatique nous dit on va avoir moins d’eau l’été, plus d’eau l’hiver (…) donc faire en sorte qu’une partie de l’eau qui tombe, on la retienne à l’intérieur des terres pour éviter qu’elle aille plus vite dans la mer, ce n’est pas un truc idéologique, c’est du bon sens », a expliqué le ministre aux agriculteurs, dont les demandent de stockage d’eau supplémentaires pour l’irrigation sont devenus un sujet de controverse.