Ramsès, Manet / Degas, Mucha, Vermeer… Que valent les grandes expos du moment ?


« Ramsès et l’or des pharaons » à la Grande Halle de la Villette

Vues in situ de l’exposition « Ramsès & l’or des Pharaons » à la Grande Halle de la Villette à Paris

Vues in situ de l’exposition « Ramsès & l’or des Pharaons » à la Grande Halle de la Villette à Paris

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© Yvan Lebert. Visual creative

Le pitch : C’est sans doute l’expo la plus attendue de l’année ! À la Grande Halle de la Villette a débarqué Ramsès, le pharaon de tous les superlatifs, détenteur du plus long règne de l’Égypte antique, un bâtisseur exceptionnel ayant laissé sa trace dans de fabuleux monuments, d’Abou Simbel, sur les bords du Nil, à l’obélisque qui trône chez nous, place la Concorde. Pour nous conter ce pan glorieux de l’histoire, 181 pièces inestimables sont sorties d’Égypte.

Ce qu’on a aimé : À moins de traverser la Méditerranée, ce n’est pas tous les jours que vous verrez de telles merveilles. Certaines n’avaient d’ailleurs jamais quitté le pays comme la tête colossale de Ramsès II en granit. Évidemment, le sarcophage en bois dans lequel on a retrouvé la momie du roi, placé en fin de parcours, en tant que prêt exceptionnel consenti à la France est l’un des clous de cette visite. Le pari de faire briller Ramsès alors que très peu de pièces lui sont finalement rattachées est réussi. On est émerveillé devant les bijoux et la profusion d’or sortis des tombes royales de Tanis, capitale de la XXIe et XXIIe dynasties. Épatantes sont aussi les momies d’animaux exhumées de Saqqarah en 2018. Et s’il vous reste encore de l’énergie, ne manquez pas l’expérience en réalité virtuelle, l’occasion de visiter le temple d’Abou Simbel et la splendide tombe de Néfertari dans la vallée des Reines, moyennant 15 euros (en plus du billet d’entrée).

Dommage : Comme avec la grande expo consacrée à Toutânkhamon en 2019, des mêmes producteurs américains, les écrans et le brouhaha sonore sont un peu too much. Si la reconstitution de la mythique bataille de Qadesh est très réussie, on est moins fan des projections du visage du pharaon, ce qui gâche le plaisir d’admirer le sarcophage en bois au cartouche de Ramsès. Et que dire des immondes parois en carton-pâte qui servent par endroit de décor : était-ce pour faire plaisir à ceux qui jetteront leur dévolu à la boutique (pleine à gogo) sur des canards de bain coiffés d’un némès ? M.B.

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Ramsès & l’or des Pharaons

Du 7 avril 2023 au 6 septembre 2023

lavillette.com

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À lire, notre hors-série « Ramsès et l’or des pharaons »

«  Manet / Degas » au musée d’Orsay

Vue de l’exposition « Manet / Degas »

Vue de l’exposition « Manet / Degas »

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Le pitch : Cela paraissait évident et pourtant ils n’avaient jamais été réunis en tête-à-tête. Légendes de la peinture moderne, Édouard Manet (1832–1883) et Edgar Degas (1834–1917) se sont rencontrés au Louvre avant de nouer une relation complexe : d’abord amis fréquentant les mêmes cercles et cultivant les mêmes intérêts, les deux peintres vont peu à peu devenir frères ennemis. En cause, la notoriété grandissante de Manet et son refus de rejoindre les impressionnistes, mais aussi leurs caractères opposés (le premier mondain, le second plus secret), et surtout une brouille devenue célèbre autour d’un double portrait peint par Degas et que Manet aurait découpé car il y trouvait son épouse Suzanne, peinte à ses côtés, « trop enlaidie ». L’exposition retrace les grandes étapes de leur relation et égraine leurs sujets communs (les courses hippiques, les cafés parisiens, le corps féminin, les portraits de famille, les scènes de plage…) en orchestrant des face-à-face de haute volée.

Edgar Degas, Portrait d’Henry Michel-Lévy dans son atelier dit aussi L’Homme et le pantin

Edgar Degas, Portrait d’Henry Michel-Lévy dans son atelier dit aussi L’Homme et le pantin, 1878

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Ce qu’on a aimé : On croyait les connaître parfaitement, mais ce dialogue pictural révèle comme jamais la modernité extrême de l’un et de l’autre, tout en mettant en lumière leur singularité. L’accrochage, sobre et efficace, y est pour beaucoup : d’une cimaise à l’autre les chefs-d’œuvre se répondent (par exemple La Prune de Manet et L’Absinthe de Degas) tandis que le parcours invite à des rebonds thématiques jubilatoires. Côté prêts, c’est une avalanche de chefs-d’œuvre venus du monde entier avec des incontournables, comme Une Jeune dame de Manet venu du Metropolitan Museum de New York (partenaire de l’exposition), et des pépites méconnues à l’image de L’Homme et le pantin de Degas [ill. ci-contre], dont l’étrangeté et l’inventivité formelle s’avèrent ici fascinantes, ou du Jambon de Manet. Un régal !

Dommage : Il fallait s’y attendre, l’exposition est victime de son succès et, malgré une scénographie aérée, difficile d’admirer les grands chefs-d’œuvre qui jalonnent le parcours en toute sérénité. On ira respirer un peu dans l’exposition adjacente, tout aussi réussie, « Pastel, de Millet à Redon », qui regorge également d’œuvres de Degas, maître incontesté dans ce domaine. F.G.

Du 28 mars 2023 au 23 juillet 2023

www.musee-orsay.fr

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À lire, notre hors-série « Manet / Degas »

« Sarah Bernhardt, et la femme créa la star » au Petit Palais

Félix Nadar, Sarah Bernhardt drapée de blanc

Félix Nadar, Sarah Bernhardt drapée de blanc, 1864

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Le pitch : Cent ans après la mort de Sarah Bernhardt, le Petit Palais, musée des beaux-arts de la Ville de Paris, lequel conserve un des plus fameux portraits de « la Divine », rend hommage en plus de 400 œuvres au « monstre sacré » selon Jean Cocteau. Mais en plus du récit de son destin de comédienne chorégraphié par ses costumes de scène de toute beauté, l’expo dévoile ses talents de peintre, sculptrice, autrice… Et démontre enfin comment la femme, engagée en plus, inventa le star system avant l’heure.

Ce qu’on a aimé : La profusion d’œuvres, signées des grands artistes de la Belle Époque, tels Mucha ou Lalique, montre bien l’extraordinaire fascination que Sarah Bernhardt exerçait en son temps. La découverte de ses objets intimes et de sa collection personnelle avec ses penchants exotiques est très savoureuse : quel goût ! Prendre le train avec elle (celui de ses tournées est reconstitué) fait aussi partie des plaisirs de cette scénographie où l’on ne s’ennuie jamais. Théâtral, comme notre star !

Dommage : R.A.S. Cette percée intime est passionnante de bout en bout. Le seul bémol, n’est pas dans l’expo : c’est notre tête transformée en Sarah Bernhardt grâce à l’amusant photomaton installé après la boutique… N’est pas star qui veut ! M.B.

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À lire, notre hors-série « Sarah Bernhardt. Et la femme créa la star »

« Des cheveux et des poils » au MAD Paris

Charlie Le Mindu, — Coiffure Blonde lips Collection Printemps- Été 2010 dite Girls of paradise Fashion Week au Royal Festival Hall, 19 septembre 2009, Londres

Charlie Le Mindu, — Coiffure Blonde lips Collection Printemps- Été 2010 dite Girls of paradise Fashion Week au Royal Festival Hall, 19 septembre 2009, Londres

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© Samir Hussein / Getty Images / presse

Le pitch : Barbes, postiches, couleurs et frisettes…Le musée des Arts Décoratifs (MAD), à Paris, consacre un parcours touffu de plus 600 œuvres à la représentation de la pilosité, longtemps négligée des expositions de mode.

Ce qu’on a aimé : La fantaisie est au poil dès la première salle qui déploie les folles perruques du Grand Siècle. On apprécie que, tout au long du parcours, les artisans, coiffeurs et barbiers ne soient jamais oubliés. Mention spéciale pour la salle qui reconstitue le salon de coiffure de nos mères et grands-mères, avec leurs casques chauffants, leurs bigoudis en vitrines et les pubs des années 1980 « qui ne piquent pas les yeux ». Sans oublier les créations artistiques qui accompagnent la section haute coiffure : ébouriffant !

Dommage : À force de vouloir brosser le poil dans tous les sens, on finit par s’emmêler dans le propos de l’exposition. Le thème de la coiffure, objet de revendications sociale et politique arrive tardivement et un peu… comme un cheveu sur la soupe ! M.B.

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Des cheveux et des poils

Du 5 avril 2023 au 17 septembre 2023

madparis.fr

« Paysage, fenêtre sur la nature » au Louvre-Lens

Vue de l’exposition « Paysage-Fenêtre sur la nature »  au Louvre-Lens

Vue de l’exposition « Paysage-Fenêtre sur la nature » au Louvre-Lens

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© Louvre-Lens_Laurent Lamacz

Le pitch : Au Louvre-Lens, une grande exposition décortique la « fabrique du paysage » en peinture de la Renaissance à nos jours, à travers plus de 170 vues époustouflantes mêlant glaciers polaires, palmiers sud-américains et ruines romaines.

Jean-François Millet, Le Printemps

Jean-François Millet, Le Printemps, entre 1868 et 1873

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Huile sur toile • 86 × 111 cm • Paris, musée d’Orsay • © Musée d’Orsay, Dist. RMN-Grand Palais / Patrice Schmidt

Ce qu’on a aimé : Conçue comme une promenade à travers un grand paysage stylisé aux couleurs vives pensé par l’artiste Laurent Pernot, l’exposition brille par la qualité et la diversité des œuvres exposées, signées des plus grands maîtres du genre, tels Claude Monet, Utagawa Hiroshige, Canaletto et Georgia O’Keeffe. On apprécie particulièrement les dispositifs lumineux changeants que Pernot a installés pour donner vie à quelques œuvres du parcours (dont l’exceptionnel Printemps de Jean-François Millet), qui s’animent et se transforment subtilement au fil des variations de lumière, comme si on les observait dans la nature. Original et magique !

Dommage : Certes joyeuse, la scénographie tombe parfois dans le kitsch, et des conflits de couleurs nuisent à certains tableaux. On regrette aussi la place réduite accordée aux paysages modernes (notamment surréalistes) et contemporains, malgré une compilation intéressante d’extraits de films. Mais le voyage reste très réussi. J.B.

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Paysage. Fenêtre sur la nature

Du 29 mars 2023 au 24 juillet 2023

www.louvrelens.fr

« Suzanne Valadon. Un monde à soi » au Centre Pompidou-Metz

Vue de l’exposition « Suzanne Valadon. Un monde à soi »

Vue de l’exposition « Suzanne Valadon. Un monde à soi »

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© Centre Pompidou Metz, Photo Marc Domage

Le pitch : Près de 60 ans après la dernière rétrospective de Suzanne Valadon en France, qui remonte à 1967 au musée national d’Art moderne, le Centre Pompidou-Metz célèbre en plus de 200 œuvres cette grande artiste, la mère de Maurice Utrillo, longtemps mise en marge.

Ce qu’on a aimé : Plonger dans la peinture résolument expressive de Suzanne Valadon, en découvrant des œuvres rarement montrées, est un vrai délice pour l’œil. Il y a du Matisse dans les motifs floraux décoratifs de Valadon, du Cézanne dans ses natures mortes, du Balthus dans son choix de dépeindre l’adolescence, du Toulouse-Lautrec, du Renoir, du Puvis de Chavannes, entre autres peintres, dont elle fut la muse de très célèbres œuvres montrées à l’expo… L’univers de cette autodidacte qui s’est nourrie en posant dans les ateliers de Montmartre est extrêmement riche. On admire sa façon de traiter la chair dans ses nus de femmes fortes, qui n’appartient qu’à elle : la peau cerclée de bleu, aux nuances pêche et olive. Du female gaze avant l’heure !

Dommage : À l’image de l’œuvre de Valadon, le parcours est conçu selon des allers-retours constants entre moments phares de la vie de l’artiste et immersion dans son œuvre dessiné et peint. Une déambulation dans laquelle on se perd un peu si on ne lit pas scrupuleusement les cartels. On regrette aussi le manque d’explications dans la salle consacrée à la collection personnelle d’Edgar Degas, premier fan de la Valadon ! M.B.

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Suzanne Valadon. Un monde à soi

Du 15 avril 2023 au 11 septembre 2023

www.centrepompidou-metz.fr

« Basquiat Soundtracks » à la Philharmonie de Paris

Vue de l’exposition « Basquiat Soundtracks »

Vue de l’exposition « Basquiat Soundtracks »

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© Estate of Jean-Michel Basquiat. Licensed by Artestar, New York. © Fondation Louis Vuitton

Le pitch : Et si l’on plongeait dans l’univers de Jean-Michel Basquiat…en musique ? Alors que la Fondation Louis Vuitton dévoile « Basquiat x Warhol, à quatre mains », la Philharmonie de Paris propose, quant à elle, de relire l’œuvre du petit génie de l’art contemporain à l’aune de toutes ses influences musicales, de la no wave au jazz. Une première !

Ce qu’on a aimé : L’immersion est totale ! Grâce à une scénographie très réussie, on se croirait à s’y méprendre dans le New York underground des années 1970–1980. Toutes les facettes du Basquiat mélomane se dévoilent petit à petit : le collectionneur de vinyles (il en possédait plus de 3 000 !), le DJ, le musicien… On est ébloui par la centaine d’œuvres réunies et la manière dont elles résonnent avec les archives vidéo, croquis et affiches de l’époque. Mention spéciale pour les déambulations du « Radiant Child » dans les rues new-yorkaises, accompagné de sa clarinette. Le plus fascinant : la manière dont Basquiat s’est inspiré du jazz ou du hip-hop pour penser son art. Tel un jazzman, il improvise la composition de ses toiles ; tel un rappeur, il utilise la méthode du sampling pour mixer mots et images. On ressort de là avec la sensation d’avoir « écouté » du grand Basquiat. Pari réussi !

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Dommage : Difficile d’avoir quelque chose à redire… Un conseil seulement : être dans les meilleures dispositions pour profiter au maximum de cette très riche exposition et de son ambiance sonore pointue, imaginée par le compositeur et ingénieur du son Nicolas Becker. J.C.

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Basquiat Soundtracks

Du 6 avril 2023 au 30 juillet 2023

philharmoniedeparis.fr

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À lire, notre hors-série « Basquiat soundtracks »

« Éternel Mucha » au Grand Palais Immersif

Image de synthèse de l’exposition « Éternel Mucha » au Grand Palais Immersif

Image de synthèse de l’exposition « Éternel Mucha » au Grand Palais Immersif, 2023

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© Mucha Trust. © metrochrome pour GPI.

Le pitch : Après « Venise révélée », le Grand Palais Immersif met à l’honneur Alfons Mucha, figure majeure de l’Art nouveau. De L’Épopée slave à ses affiches publicitaires, l’exposition souhaite cette fois-ci révéler la puissance picturale du style Mucha qui inspire encore aujourd’hui. 

Ce qu’on a aimé : Parcourir l’ensemble de l’œuvre de Mucha sur grand écran, découvrir mille et un détails de ses créations… C’est avant tout un grand show visuel ! Dans la deuxième partie de l’exposition, on est conquis par l’explication des influences de l’artiste sur le manga japonais, les comics américains ou encore les jeux vidéo. 

Dommage : Contrairement à « Venise révélé », trop didactique, le spectacle audiovisuel manque un peu de contextualisation.  Quel est le propos derrière ces belles images ? La deuxième partie manque aussi de solidité — et on est frustré de devoir se contenter de tablettes numériques, même si la fin de l’exposition sur l’héritage et la postérité de Mucha dans la création contemporaine rectifie le tir ! On en ressort un peu déçu, surtout en prenant en compte le prix du billet… J.C.

Du 22 mars 2023 au 5 novembre 2023

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À lire, notre hors-série « Éternel Mucha »

« Germaine Richier » au Centre Pompidou

Germaine Richier photographiée par Agnès Varda dans son atelier avec « La Sauterelle »

Germaine Richier photographiée par Agnès Varda dans son atelier avec « La Sauterelle », Mars 1956

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© Agnès Varda – Fonds Agnès Varda déposé à l’Institut pour la Photographie.

Le pitch : Coorganisée avec le musée Fabre de Montpellier, cette rétrospective de 200 œuvres de la sculptrice Germaine Richier (1902–1959) retrace la carrière d’une artiste fondamentale, entrée dans l’histoire pour avoir été, en 1956, la première artiste femme exposée de son vivant au musée national d’Art moderne.

Ce qu’on a aimé : Débutant avec un groupe foisonnant de portraits sculptés (Germaine Richier en façonnera une cinquantaine au fil de sa carrière), le parcours s’attarde ensuite sur les différentes hybridations créées par Germaine Richier, entre figures humaines et végétaux ou insectes. L’Homme-forêt (1945) ou La Mante religieuse (vers 1946) témoignent de ce travail puissant sur la forme et sur l’osmose entre les hommes et la nature. Un travail qui résonne avec les préoccupations écologiques actuelles, et qui se trouve ici magnifiquement mis en valeur. On apprécie aussi la présence de nombreux et superbes travaux sur papier. La scénographie, joueuse, entraîne le corps des visiteurs dans un mouvement dansant, invitant à tourner autour des œuvres ; elle s’achève sur des sculptures colorées, l’artiste ayant à la fin de sa vie travaillé à peindre et émailler quelques-uns de ses bronzes et plâtres. Des recherches interrompues par sa disparition précoce.

Dommage : A priori, aucun défaut pour cette rétrospective aussi sensible qu’exhaustive, également riche en photographies d’archives de l’artiste. Un peu rapide sur ses débuts et son apprentissage, peut-être, mais cela ne manque pas tant que ça à la compréhension de son œuvre. Un très beau rendez-vous, vraiment. M.C.-L.

Du 1 mars 2023 au 12 juin 2023

www.centrepompidou.fr

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À lire, notre hors-série « Germaine Richier »

« Matisse. Cahiers d’art, le tournant des années 30 » au musée de l’Orangerie

Henri Matisse, Grand nu couché (Nu rose)

Henri Matisse, Grand nu couché (Nu rose), 1935

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Huile sur toile • 66,4 × 93,3 cm • Baltimore Museum of Art • © Succession H. Matisse / Photo Baltimore Museum of Art / Mitro Hood

Le pitch : Lassé de ses odalisques, Matisse traverse, au début des années 1930, une intense période de doute… Au point de ne plus toucher à ses pinceaux ! Il renoue avec l’inspiration après un voyage à Tahiti, en répondant à une commande du riche collectionneur américain Albert Barnes : La Danse. De retour en France, le fauve a complètement revu sa méthode de travail et ses recherches lui ouvrent finalement la voie de la peinture pure. Une renaissance dont a été le témoin la revue Cahiers d’Art.

Ce qu’on a aimé : D’abord, comme Anne Sylvestre, on aime les gens qui doutent – surtout les artistes. Si cette décennie des années 1930 n’est pas la plus prolifique de Matisse, elle n’en demeure pas moins l’une des plus passionnantes. À travers des prêts exceptionnels, dont le fameux Grand nu couché (1935) venu du Baltimore Museum of Art, on assiste sur les cimaises du musée de l’Orangerie à la puissante renaissance d’un fauve. Celle-ci s’achève en apothéose, avec une somptueuse réunion d’intérieurs colorés semblables à des jardins d’Éden, au centre de laquelle trône la fameuse Blouse roumaine (1940). Bref, de la peinture à l’état pur… On rugit de plaisir !

Dommage : Le lien avec les Cahiers d’Art n’est pas toujours évident… C’est d’ailleurs une spécificité de la version parisienne de l’exposition, qui a d’abord été présentée au musée de Philadelphie avant de faire prochainement escale au musée Matisse à Nice. On se dit finalement que cette mythique revue, qui a suivi le travail des plus grands artistes du XXe siècle, aurait bien mérité sa propre exposition ! I.B.

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Matisse. Cahiers d’art, le tournant des années 30

Du 1 mars 2023 au 29 mai 2023

www.musee-orangerie.fr

« Irving Penn. Chefs-d’œuvre de la collection de la MEP » aux Franciscaines

Irving Penn, Red-Lacquered Lid, New York

Irving Penn, Red-Lacquered Lid, New York, 1994

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photographie • Collection MEP, Paris • © The Irving Penn Foundation

Le pitch : La Maison européenne de la Photographie a prêté ses trésors aux Franciscaines de Deauville – une centaine de clichés d’un géant de la photo américaine : Irving Penn. L’exposition revient sur le parcours de cet artiste qui a tout exploré, de la photographie de mode à la nature morte en passant par le portrait.

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Ce qu’on a aimé : Cette monographie permet d’apprécier toutes les facettes du travail d’Irving Penn, de ses premières images capturées au Rolleiflex – alors qu’il se rêvait peintre – à ses dernières expérimentations visuelles en couleurs. L’exposition ravira autant les amateurs de belles images que les puristes de l’argentique : en plus d’être un photographe de légende, Penn était aussi un tireur au talent quasiment inégalé. On y redécouvre avec délice ses célèbres portraits d’artistes et quelques-unes de ses photos de mode iconiques où resplendit sa femme, Lisa Fonssagrives. Mention spéciale enfin pour la scénographie, très sobre, qui rend ici grâce à l’élégance intemporelle du style Penn.

Dommage : On a beau chercher, on ne trouve pas… Nous profiterons donc de ces quelques lignes pour vous conseiller, après l’exposition, de visiter les autres espaces des Franciscaines, ancien couvent et orphelinat brillamment transformé par l’agence Moatti & Rivière en lieu de savoir et de vie. I.B.

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Irving Penn. Chefs-d’œuvre de la collection de la MEP

Du 4 mars 2023 au 28 mai 2023

lesfranciscaines.fr

« Ma pensée sérielle. Miriam Cahn » au Palais de Tokyo

Vue de l’exposition de Miriam Cahn « Ma pensée sérielle » au Palais de Tokyo

Vue de l’exposition de Miriam Cahn « Ma pensée sérielle » au Palais de Tokyo

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© Sandrine Marty / Hans Lucas via AFP

Le pitch : Née en 1949 à Bâle, la peintre suisse Miriam Cahn connaît au Palais de Tokyo sa première grande rétrospective dans une institution française. Les 200 œuvres réunies (peintures et dessins) s’étalent du sol au plafond, sans cadre. Un accrochage qui constitue selon l’artiste une « œuvre en soi ».

Ce qu’on a aimé : L’impression d’entrer dans l’esprit, dans l’atelier et dans l’univers sensible de Miriam Cahn est immédiate, fulgurante. Elle explique vivre et travailler retirée du monde, dans une vallée reculée des Alpes suisses, d’où elle ne perçoit le monde (et sa violence) qu’à travers le chaos d’images déversé par les médias. La répétition de ses motifs, de ses visages ahuris, de ses chairs écarlates, et cet accrochage saturé créent ensemble une immersion brutale. Qui ne saurait laisser le visiteur indifférent, puisqu’en plus des corps nus et des scènes d’accouchement sont peints les violences et les viols, les guerres et des disparitions massives de personnes migrantes en mer. Qu’on aime ou pas Miriam Cahn, cette exposition est un choc dont on se rappellera longtemps.

Dommage : Miriam Cahn le dit elle-même : cette exposition est une « performance », qui hurle et enrage, montre de façon frontale des sexes et des actes de barbarie. Au vu du tollé qui a accompagné l’exposition, peut-être aurait-il fallu guider davantage les visiteurs, les prévenir aussi bien de la radicalité du travail ici exposé que de ses nuances, capitales pour la bonne compréhension de sa démarche. M.C.-L.

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Ma pensée sérielle. Miriam Cahn

Du 17 février 2023 au 14 mai 2023

palaisdetokyo.com

« Giovanni Bellini. Influences croisées » au musée Jacquemart-André

Vue de l’exposition « Giovanni Bellini. Influences croisées »  au musée Jacquemart-André

Vue de l’exposition « Giovanni Bellini. Influences croisées » au musée Jacquemart-André

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© Culturespaces Thomas Garnier

Le pitch : Giovanni Bellini est un artiste incontournable du début de la Renaissance. Son travail est ici mis en lumière (pour la première fois en France !) aux côtés de ceux qui l’ont inspiré, à commencer par son père, Jacopo Bellini, son frère, Gentile, et son beau-frère, Andrea Mantegna.

Ce qu’on a aimé : Difficile à croire, pourtant il a bien fallu attendre 2023 pour que cette figure majeure de la peinture vénitienne soit enfin montrée en France ! Le parcours, chrono-thématique, permet de suivre l’évolution du style de Giovanni Bellini, qui s’est nourri ne nombreuses influences – à commencer par celles de son père, puis celles de Mantegna (qui a épousé sa sœur), mais aussi d’Antonello de Messine, auprès duquel il a perfectionné sa technique à l’huile. Au fil du parcours, on s’émerveille face à ses talents de coloriste et l’on s’émeut de concert avec ses personnages qui expriment toute une palette d’émotions, du rire aux larmes.

Dommage : Le choix des couleurs pour les cimaises de certaines salles n’est pas du meilleur effet et nuit à la lecture des œuvres. I.B.

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Giovanni Bellini. Influences croisées

Du 3 mars 2023 au 17 juillet 2023

www.musee-jacquemart-andre.com

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À lire, notre hors-série « Giovanni Bellini, influences croisées »

« Vermeer » au Rijksmuseum

Visiteuse admirant « La Jeune Fille à la perle » (1665) à l’exposition « Vermeer » au Rijksmuseum

Visiteuse admirant « La Jeune Fille à la perle » (1665) à l’exposition « Vermeer » au Rijksmuseum, 2023

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Le pitch : Le Rijksmuseum à Amsterdam consacre une rétrospective historique à Johannes Vermeer, peintre iconique du Siècle d’or, dont seule une trentaine de tableaux nous sont parvenus.

Ce que l’on a aimé : 28. C’est le nombre de tableaux de Vermeer ici réunis, soit la quasi totalité de la production connue du peintre, une première mondiale ! Rien que pour cela, l’exposition, dont tous les billets ont été vendus en un temps record, mérite le déplacement. La fameuse Laitière y côtoie Le Géographe, La Femme à la balance ou encore la Liseuse à la fenêtre – autant de chefs-d’œuvre venus des quatre coins du monde. On s’amuse à reconnaître, dans certains tableaux, des accessoires, comme cette robe jaune que l’on retrouve du côté de la Jeune femme écrivant une lettre et de la Maîtresse et la servante. Le parcours, chrono-thématique, donne l’impression de toucher du doigt le mystère Vermeer…

Dommage : Il fallait s’y attendre, face à l’affluence, il est difficile d’approcher les tableaux (souvent de petit format) d’autant plus que ceux-ci sont séparés du public par une balustrade ! De plus, peu de textes accompagnent la visite, sans doute dans un souci de gestion des flux de visiteurs… Enfin, si vous rêviez d’un (forcément bref) tête-à-tête avec la Jeune Fille à la perle, passez votre chemin ! Prêtée pour le début de l’exposition, elle est rentrée chez elle, au Mauritshuis. I.B.

Du 10 février 2023 au 4 juin 2023

www.rijksmuseum.nl

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Ne manquez pas notre expérience immersive « Vermeer révélé », conçue pour l’événement :

« Anna-Eva Bergman. Voyage vers l’intérieur » au musée d’Art moderne de Paris

Vue de l’exposition « Anna-Eva Bergman. Voyage vers l’intérieur »  au MAM

Vue de l’exposition « Anna-Eva Bergman. Voyage vers l’intérieur » au MAM

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Le pitch : Le musée d’Art moderne de Paris fait toute la lumière sur l’œuvre d’Anna-Eva Bergman, longtemps restée dans l’ombre de son mari, le peintre Hans Hartung (a qui le même musée avait aussi consacré une grande rétrospective en 2019–2020).

Ce qu’on a aimé : Les expositions collectives d’artistes femmes « oubliées », c’est bien. Les grandes monographies, c’est encore mieux. Et nous n’avons pas été déçus ! L’exposition, riche de 200 œuvres et documents permet de s’immerger, corps et âme, dans l’art et la vie d’Anna-Eva Bergman, de ses premiers dessins pour la presse à ses grandes toiles énigmatiques, parées de larges aplats d’or et d’argent. Épurée, silencieuse, sa peinture se vit comme une profonde méditation sur l’existence et la nature. On s’y sent tout léger, apaisé… Et qu’il est dur, une fois sorti du musée, de se confronter de nouveau au réel !

Dommage : Puisque nous n’avons rien à reprocher à cette démonstration magistrale de la puissance tellurique de l’œuvre de Bergman, laissons le mot de la fin à l’artiste : « Le véritable secret de l’art ne réside pas dans la volonté de créer mais de laisser quelque chose se créer à travers soi. » I.B.

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Anna-Eva Bergman. Voyage vers l’intérieur

Du 31 mars 2023 au 16 juillet 2023

www.mam.paris.fr

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À lire, notre hors-série « Anna-Eva Bergman. Voyage vers l’intérieur »



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