La chute de production laitière néo-zélandaise est-elle « un trou d’air ou un phénomène durable » ? Réponses de l’Idele, entre prix élevés de l’aliment, météo incertaine, manque de main-d’œuvre et retrait de la demande chinoise.
Selon le département américain de l’Agriculture (USDA), elle baisserait de 1 % par rapport à 2021. « Sur le premier trimestre, elle a déjà chuté de 6 % et a atteint le niveau le plus bas depuis 2013 sur un trimestre », détaille l’économiste
De fait, la production en Nouvelle-Zélande a été « coupée dans son élan » en raison d’un printemps austral (septembre à décembre 2021) chaud et sec qui a beaucoup freiné la pousse de l’herbe, détaille-t-elle. Puis « les pluies de fin-février et mars ont limité la baisse de la collecte sur cette période », mais « il s’est vite arrêté de pleuvoir ». D’autre part, des inondations au sud de l’île avaient entaché la récolte des céréales fourragères, notamment du maïs.
Si bien que cette année, « le stock de fourrages n’est pas exceptionnel, voire pas bon, et l’état des pâtures en mai n’augure pas de bons chiffres de production laitière en mai-juin ».
La météo sera particulièrement déterminante pour la production au moment du pic laitier, en septembre-octobre : « s’ils ont une très bonne production d’herbe, ça changera la donne et la production repartira forcément à la hausse ».
Le cheptel devrait encore fléchir
De son côté, le cheptel laitier néo-zélandais a atteint un maximum de 5 millions de vaches en 2014, avant de se tasser un peu chaque année qui a suivi. Il a ainsi perdu 4 % depuis 2015, et devrait à nouveau fléchir de 0,6 % entre 2021 et 2022.
Mais là aussi l’incertitude est de mise : le Covid a réduit la main-d’œuvre disponible dans les abattoirs, ce qui provoque d’importants retards d’abattages dans le pays (en mai, le retard atteignant un mois). « Si c’est trop compliqué d’abattre, les éleveurs garderont peut-être les vaches une année de plus ».
Un autre élément pourrait jouer sur le cheptel laitier néo-zélandais, souligne l’experte : la loi relative à la réglementation de l’eau est en train de changer, ce qui pourrait modifier les modes d’élevage à court terme, et réduire la production.
Des prix peu incitatifs, bien qu’historiquement hauts
Les prix du lait sont « historiques » : 9,3 dollars néo-zélandais par kg de matière sèche chez Fonterra pour 2021/22, l’équivalent de 500 €/1 000 l… Mais ils passent à 6,5 dollars/kg si on le corrige de l’inflation. Comme pour les autres exportateurs, le prix du lait n’est donc « pas assez incitatif au regard des coûts de production », note Marion Cassagnou : il n’encourage pas les éleveurs à produire.
Des exportations suspendues à la demande chinoise
Entre 2020 et 2021, les exportations néo-zélandaises de produits laitiers ont augmenté de 2 % en volumes et grimpé de 10 % en valeur, portées par le poids grandissant des achats chinois, notamment de poudre grasse. L’Empire du milieu représentait 5,7 Mrd€ des exports du pays en produits laitiers en 2021, soit 46 % des ventes et une hausse de 26 % par rapport à 2020.
La tendance a changé sur début 2022 : les volumes de fromages exportés ont notamment baissé de 11 % en un an sur la période janvier-mai. Ils ont plongé de 21 % pour la poudre grasse, une contraction liée au retrait de la Chine, qui a dû reconfiner Shangai et ralentir son activité à cause du Covid.
« La Nouvelle-Zélande a la moitié de ses débouchés en suspens, dépendants de la Chine, résume l’économiste. On verra si le ralentissement chinois perdure ou pas pendant l’année… »