« Ce serait un gros coup de masse » : au Salon du chocolat, debout derrière son stand où sont alignées des petites ganaches carrées, Maxime Henry confie être « inquiet » face à la menace d’un durcissement fiscal pour les chocolatiers.
« Si demain, les taxes doivent augmenter, on n’aura pas d’autre choix que d’augmenter nos prix. (…) Mais ce serait dur, parce que ça fait cinq ans qu’on se bagarre pour maintenir nos tarifs », dit à l’AFP le chocolatier qui a repris l’entreprise familiale Maison Henry en 2019. En cinq ans, les coûts de l’énergie, du sucre et, plus récemment, du cacao ont fortement progressé.
D’autres artisans évoquent une possible réduction de leurs marges, ou des portions.
La semaine dernière, des députés ont ajouté en commission un amendement au projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2025 prévoyant une taxe sur les produits alimentaires transformés liée à leur teneur en sucre. Son sort d’ici le vote final sur le PLFSS est incertain.
Mi-octobre, l’Institut Montaigne recommandait dans un rapport d’harmoniser à 20 % la TVA sur divers produits sucrés pour financer la lutte contre la précarité alimentaire. Le chocolat noir, taxé aujourd’hui à 5,5 %, était dans le viseur.
Si ces projets de taxation venaient à se concrétiser, Sylvain Garcette, cogérant de la petite entreprise de quatre salariés basée dans le Tarn Ô Gourmandises d’Alice, présent sur le salon pour la deuxième année de suite, préfèrerait « peut-être baisser de 100 à 90 grammes le poids de [sa] tablette », persuadé qu’un coût trop élevé serait pour ses clients « un frein à l’achat ».
Une mesure qui favorise les produits bas de gamme
Les acheteurs de la maison Pralus, qui possède 19 boutiques en France et réalise 25 millions d’euros de chiffre d’affaires, sont « des amateurs de chocolats, prêts à mettre un certain prix », analyse Hugo Pralus, responsable production de la chocolaterie familiale, « mais il y a une limite. »
L’augmentation par la maison Pralus du prix de la tablette de chocolat noir 75 % de un euro, la première en 10 ans, poussée par l’inflation du sucre, n’a pas ébranlé les volumes de ventes cette année. Mais une taxe aurait de nouveau « un impact direct sur le prix du produit final », déplore Hugo Pralus, qui n’écarte pas la possibilité de réduire son taux de marge – actuellement « autour de 15 % » pour une tablette de chocolat classique.
Les artisans chocolatiers représentent 5 % des ventes du marché français du chocolat et emploient 11.000 personnes, selon leur confédération. Parmi eux, 87 % sont des entreprises de moins de 20 salariés.
Daniel Mercier, président de l’association des chocolatiers engagés, a dénoncé une taxe qu’il estime contre-productive et qui « risque d’emmener les consommateurs vers des produits plus bas de gamme ». Alors même que les artisans ont fait des efforts ces dernières années pour « réduire les teneurs en sucres et en gras » de leurs produits, a contrario des industriels.
« Si le sucre doit être diminué, c’est peut-être pour des produits dans lesquels on ne devrait pas le trouver. Dans les conserves de légumes, les plats préparés, comme des lasagnes. [Le chocolat] n’est pas forcément consommés quotidiennement », a renchéri le président des chocolatiers et confiseurs, Thierry Lalet.